Quelle femme, M.Abdallah?

Qasem Kiani

Le roi Abdallah a accordé en Arabie le droit de vote aux femmes. Pourtant  personne dans les médias occidentaux   et arabes n’en a fait mention. En réalité, ce n’était pas une nouvelle digne d’être mentionnée. Les femmes saoudiennes ne bénéficient pas de beaucoup de droits.  Nous entendons par là de droits que les Occidentaux ont  en esprit : droit de voter, droit de conduire ou droit de voyager seule, sans  garde du corps masculin.

Mais la famille royale a fait du 25 septembre dernier une date historique inoubliable pour les femmes saoudiennes. C’était le jour où le roi Abdallah,  par une réforme   inattendue, a accordé le droit de vote aux femmes. Cette réforme s’expliquerait par les révolutions arabes.

Le roi Abdallah  a sans aucun doute pris une étonnante décision. On pourrait même la qualifier de progrès insigne. Les premières élections auxquelles les femmes auraient la permission de participer  seraient celles de 2015. Elles auraient même le droit  d’être candidates. Mais comme les élections aux conseils consultatifs  sont plus proches les femmes peuvent y participer en 2012.

Mais la principale question est la suivante: pour quelle raison la famille saoudienne    a-t-elle  pensé aussi tard à entreprendre des réformes? Le roi Abdallah  a 88 ans et  collectionne de nombreuses maladies.  Il pourrait ne plus être vivant l’année prochaine. Son héritier  le prince Sultan   est déjà décédé à New York.  Son probable successeur serait le prince Nayef, un  conservateur qui a une opinion différente de celle du  roi Abdallah en ce qui concerne les femmes.  Il leur avait ouvertement rejeté à plusieurs reprises le droit de conduire.
Dans les premières années de son règne, le roi Abdallah était  considéré comme un homme de réformes. Mais   il ne disposait de suffisamment de pouvoir au sein de la famille royale  pour  les entreprendre.  La branche sunnite conservatrice faisait pression sur lui. La famille royale a voulu tout faire pour adapter  ces réformes à l’Islam sunnite ou du moins de faire semblant. Le roi Abdallah avait souvent répété que tout le monde connaissait la place de la femme dans la religion musulmane et que cette place ne pouvait  être redéfinie.
Or il semble que le roi Abdallah n’a pu décider seul dans ce domaine. Selon une source proche de la famille saoudienne, il ne jouit que de quelques heures  par jour  de concentration suffisante pour travailler et décider. La semaine dernière, le roi  Abdallah  a pris la décision la plus vitale de ces derniers temps : le président du Yémen, Ali Abdallah Saleh  est rentré  à Sanaa après  quatre mois, avec le feu vert de Riyad et de Washington. Ce retour est le résultat de la décision commune de Washington et de Riyad, mais nombreux sont ceux qui estiment qu’elle n’était pas  dans l’intérêt de  l’avenir du Yémen.

On ignore qui se trouve derrière le feu vert au retour  de Saleh mais tout le monde  sait que derrière les réformes concernant les femmes, se trouve l’une des filles d’Abdallah, Adila, qui a beaucoup travaillé  pour faire progresser les droits des femmes. Elle est fermement décidée à obtenir le droit de conduire pour les femmes. Elle se trouve aussi derrière la désignation d’une femme en 2009 en tant que vice- ministre  de l’éducation. Nour al Fayez est la première femme  saoudienne à obtenir  un tel poste. Outre l’histoire de sa fille, le roi Abdallah est un homme politique d’Arabie  qui ne désirerait pas tellement accorder  des droits  fondamentaux aux femmes.

En 1994, le roi Abdallah a agi selon la tradition musulmane et a  pris quatre femmes.  En se conformant à cette tradition, il  a  favorisé sa succession au roi Fahd. Le plus jeune fils de Fahad est né alors qu’il avait 90 ans. Sihab, sa fille s’est mariée avec le fils du roi de Bahreïn, fille née en 1993  alors qu’il avait 70 ans. Selon  Les révélations de Wikileaks, le roi Abdallah fume plusieurs paquets de cigarettes par jour et prend différents médicaments pour rester jeune et  se doper. Or dans une Arabie dotée d’une telle structure traditionnelle, est-ce ce que les femmes désirent  participer aux élections?